L'île des naufragés, Louis Even

L'île des naufragés, Louis Even

 

Une fable qui fait comprendre le mystère de l'argent (1936)

Louis EEven portraitven: 1885-1974, philosophe et religieux canadien resté célèbre pour avoir introduit le Crédit Social au Québec. Ce court texte (8 pages papier format tabloïd) a été traduit en français, anglais, espagnol, italien, allemand, polonais et portugais. Mis en vidéo il y a une dizaine d'années. Voir le texte ici 

L'intérêt de ce texte est surtout historique: écrit en 1936, il prouve que l'idée d'une remise en cause fondamentale de l'argent n'est pas une nouveauté, mais que depuis toujours elle paraît assez folle (ou utopique) pour que la réflexion s'arrête en chemin et nous fasse refuser le dernier pas mental, celui de penser une abolition pure et simple du système.

Résumé: Libérés des contraintes sociales et politiques par le naufrage sur une île déserte, les personnages ont "carte blanche". Ils n'ont absolument plus besoin d'argent pour survivre, l'île étant riche et suffisante. Ils ont des savoirs-faire pour exploiter les ressources de l'île. Ils se sentent solidaires les uns des autres. Tous les éléments sont là pour organiser une micro société idéale. Mais un jour arrive un autre naufragé, un certain Martin Golden, banquier de son état, qui leur fait miroiter les nombreux avantages d'une monnaie qEven imageui réglerait tous les problèmes d'échanges, de dettes mutuelles au sein de leur micro société.  Les naufragés se laissent se laissent avoir, par un discours bien élaboré mais quand ils s'en aperçoivent, c'est trop tard. Le banquier créateur de monnaie les tient en otages par les intérêts de la dette qu'il a lui-même créé. Pour se libérer de l'emprise du banquier,  ils inventent alors un autre système monétaire, le "Crédit Social". Cette alternative semble logique mais il est évident que système de Martin finira à terme par faire de lui le seul propriétaire de l'île et de ses ressources, que les prix vont augmenter, qu'ils seront contraint de travailler plus qu'avant: d'abord pour produire les biens nécessaire à leur survie, ensuite pour payer les intérêts à Martin qui continue à détenir la monnaie...                  

     Presque un siècle après la publication du texte de Louis Even, la grande majorité de nos contemporains espèrent encore éviter l'abolition de l'argent en instaurant une économie sociale et solidaire, une monnaie juste, une planification écologique, n'importe quoi qui évite de sauter le pas… C'est illogique, contraire à toute analyse systémique, pratiquement utopique, mais rien n'y fait. Si nous prolongeons la métaphore de Louis Even, il faudra attendre l'effondrement global, la désertification de l'île ou son engloutissement sous la montée de l'océan, pour admettre que l'argent est mortifère…  Visiblement, Louis Even n'avait pas encore pressenti les effets mécaniques de l'argent qui, indépendemment de toute régulation et de toute moralisation,  induisent les inégalités sociales, les guerres économiques, la destruction de l'environnement. Even aujourd'hui penserait certainement que la vie serait plus belle sur "l'île des naufragés" sans le banquier Martin et sa monnaie de singe!....